"Que voulez-vous que je vous raconte ?
Moi, je n'ai rien à dire..."
Une histoire qu’on interroge, ça commence parfois comme ça. Un refus presque catégorique. Presque, parce qu’il laisse traîner derrière lui, au cas où une oreille attentive les ramasserait, un mot, puis deux, puis trois qui forment une phrase et, en poussant un peu, une histoire.
Finalement, on se rend compte que le plus dur n’est pas de commencer à raconter, mais de s’arrêter de parler. Cette attitude, je l’ai observée, je l’ai vécue en tant que journaliste, mais aussi en tant qu’animatrice d’ateliers radio. Au fil des rencontres et de mes différentes expériences professionnelles, j'ai pris conscience de la richesse humaine de nos histoires ordinaires, à condition de bien vouloir m'arrêter, d'oser la rencontre.
J'ai aussi pris conscience du besoin, pour chacun, de s'exprimer, de raconter, et surtout d’être entendu.
Que voulez-vous que je vous dise ? Je suis comme la plupart des gens, timide face au micro qui s’approche, mais heureuse de l’oreille qui se tend. Fileuse d’histoires, c’est une idée qui prend source dans le paysage de mon enfance. Assise sur un tapis, une chaise ou sur mon lit, les oreilles collées à cette voix qui prend le temps de raconter aux enfants, celle d’un être absent qui s’échappe d’un vinyle 45 tours. Des histoires et des voix, ça commence comme ça.
Pour suivre le cours de cette idée, j'ai traversé de nombreuses pages de cahiers
et emprunté le pont reliant les terres de l’imaginaire à celles du réel.
D’un côté ou de l'autre, des histoires, il y en a tout autant ; la mienne, celle des autres et en toile de fond, un fil qui nous relie, parfois solide, noué ou abîmé. Quels que soient le lieu, le temps, les événements, je souhaite retranscrire ces histoires, leur faire une place et dérouler le fil qui les relie et donne sens à nos vies.
Martine Brémond